Vaste sujet que la déduction de la PCH sur l’indemnisation reçue de la victime !
La prestation de compensation du handicap (PCH) est une aide financière destinée à compenser la perte d’autonomie dans la vie quotidienne et sociale. Elle est allouée à la victime qui en fait le demande par la CDAPH ; elle est, depuis le 1er janvier 2022, attribuée pour une durée de maximale de 10 ans(et de façon exceptionnelle sans limitation). A la fin de ladite période, il appartient au bénéficiaire de la PCH de déposer un nouveau dossier. Il n’est en revanche jamais certain que la personne qui a bénéficié de la PCH une première fois se la verra attribuer une nouvelle fois…
Quand la victime a droit à une indemnisation par un tiers responsable, s’est posée la question de savoir si la PCH pouvait se déduire de l’indemnisation à la charge de ce tiers.
Pour les assureurs, la jurisprudence est claire : c’est non ! La PCH n’est pas une prestation soumise à recours.
Mais dans le cas où l’indemnisation est à la charge du Fonds de Garantie, c’est l’article 706-9 du CPP qui donne la réponse : la CIVI, compétente en pareil cas, « tient compte également des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d’autres débiteurs au titre du même préjudice ».
Les termes « indemnités de toute nature reçues ou à recevoir » étend de façon très large les possibilités de déduction…
S’engouffrant dans cette brèche, le Fonds de Garantie ne manque pas de demander la déduction d’une éventuelle PCH qui n’est pas toujours sollicitée par les victimes et de la déduire à titre viager alors même que rien n’en garantit le caractère viager….
En l’espèce le Fonds avait obtenu de la Cour d’Appel sur le fondement de l’article 706-10 CPP de subordonner le versement des sommes au titre de la tierce personne à la production annuelle de non perception de la PCH.
Censure – bienvenue – de la Cour de cassation qui juge que le versement de la rente au titre de la tierce personne n’est pas subordonné à une telle justification !
« Les choses que je verrai ou que j’entendrai dire dans l’exercice de mon art, ou hors de mes fonctions dans le commerce des hommes, et qui ne devront pas être divulguées, je les tairai, les regardant comme des secrets inviolables. » (serment d’Hippocrate)
Le secret médical, qui trouve son origine dans le serment d’Hippocrate, est un devoir fondamental de l’exercice de la profession médicale, aujourd’hui encadré tant sur le plan pénal que déontologique.
Le secret médical est un devoir du médecin et un droit du patient. En dehors des exceptions strictement encadrées par la loi, le médecin n’a pas le droit de révéler une quelconque information sur un patient sans l’accord de celui-ci.
Une telle violation est punie d’un an d’emprisonnement et 15 000€ d’amende, à laquelle peut s’ajouter la mise en œuvre de la responsabilité du médecin dès lors que le patient souffre d‘un préjudice moral ainsi que les sanctions disciplinaires.
En matière de dommage corporel, s’est posée la question du respect du secret médical au cours des expertises : l’expert est-il délivré de cette obligation dans la mesure où la victime n’est pas son patient ?
La réponse, si elle paraissait évidente, ne l’était en réalité par pour tout le monde…
En l’occurrence, la victime d’un accident de la circulation avait subi une expertise diligentée par un assureur dans un cadre amiable. Contrainte de demander plus tard la désignation d’un expert judiciaire, elle avait eu la désagréable surprise de voir le médecin-conseil de l’assureur produire devant l’expert judiciaire le rapport d’expertise médicale établi par ses soins.
Elle avait alors déposé plainte pour violation du secret médical.
Sur le plan pénal, la Cour de cassation confirmait le 16 mars 2021 que « la communication à un tiers d’une pièce médicale couverte par le secret médical est par principe interdite, sauf accord exprès de la personne concernée »
Sur le plan disciplinaire, la chambre disciplinaire du Conseil de l’Ordre des Médecins avait infligé un blâme au médecin. En appel, la chambre disciplinaire nationale avait annulé cette décision et rejeté la plainte de la victime.
Le Conseil d’Etat annule cette décision le 15 novembre 2022 et retient « qu’il résulte de l’article L.1110-4 du Code de la santé publique que le partage d’informations couvertes par le secret médical entre professionnels de santé requiert le consentement de la personne concernée »
Lien Légifrance Conseil d’État
Lien Légifrance Cour de Cassation
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Le 19 janvier 2023, la Cour de Cassation apporte des éléments de précision d’une grande utilité sur le calcul du préjudice économique d’une victime par ricochet, en l’occurrence un des enfants de la victime directe.
En cas de décès de la victime directe, le calcul du préjudice économique de la famille (en réalité les membres du foyer fiscal) n’est pas chose aisée puisqu’il est tenu compte des revenus avant décès tant du foyer fiscal que de la victime directe, de la part d’autoconsommation de chacun d’entre eux et enfin de l’espérance de vie ou dans le cas des enfants de la durée prévisible du maintien au domicile des parents.
Une difficulté supplémentaire intervient dans l’hypothèse où les parents sont divorcés : faut-il tenir compte de la contribution à l’entretien et à l’éducation (la pension alimentaire) que le père versait à la mère décédée ?
Pour la Cour de Cassation, le préjudice économique d’un enfant du fait du décès d’un de ses parents doit être évalué sans tenir compte ni de la séparation ou du divorce de ces derniers, puisque cette circonstance est sans incidence sur l’obligation de contribuer à l’entretien et à l’éducation de l’enfant, ni du lieu de résidence de celui-ci.
L’article 3 de la loi Badinter du 5 juillet 1985 dispose « Les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu’elles ont subis, sans que puisse leur être opposée leur propre faute à l’exception de leur faute inexcusable si elle a été la cause exclusive de l’accident. »
Depuis une série d’arrêts du 20 juillet 1987, la Cour de Cassation a défini la faute inexcusable de la sorte : « seule est inexcusable, au sens de la loi du 5 juillet 1985, la faute volontaire d’une exceptionnelle gravité, exposant sans raison valable son auteur à un danger dont il aurait du avoir conscience. »
Le 21 décembre 2023, la Cour de cassation a censuré une cour d’appel d’avoir caractérisé une telle faute dans un cas où finalement même si la victime a été imprudente, elle n’a pas commis de faute inexcusable. Précisons que la victime « évoluait sur une planche à roulettes, à très vive allure, dans une rue à forte déclivité, sans avoir arrêté sa progression en bas de cette rue, dans une ville très touristique, au mois d’août, à une heure de forte circulation, en étant démuni de tout système de freinage ou d’équipement de protection ».
La Cour de cassation adopte par cette position l’esprit qui a présidé au vote de la loi Badinter de pouvoir indemniser la quasi-totalité des victimes non-conductrices.